Le ministère qatari des Affaires étrangères a annoncé hier - mardi 13 juin - par voie de presse son retrait de la médiation que le pays menait depuis de nombreuses années entre la République de Djibouti et l’Erythrée, à la suite du conflit armé durant lequel les troupes des deux pays se sont affrontées du 10 au 13 juin 2008.
Aussitôt annoncé, le retrait des troupes d’interposition militaires qataris positionnées le long de la frontière entre les deux pays ne s’est pas fait attendre. Ils ont rapidement plié bagages, et étaient déjà ce matin à l’Escale débarquant du ferry reliant le Nord à la capitale. Prévisible, ce retrait sonne le glas de la médiation. Suite à cette réaction qatarie, des troupes djiboutiennes ont commencé à être déployées pour renforcer les forces stationnées dans la région d’Obock afin de prévenir le cas échéant un quelconque regain de tension entre les deux pays.
On notera qu’aucune des parties n’a intérêt à relancer le différend militairement, et il est fort probable que la situation reste stable. Le secrétaire général des Nations-unies devrait agir rapidement auprès des deux pays pour s’assurer du maintien du statu quo afin que la situation ne s’envenime pas dans une sous région déjà suffisamment troublée.
Pour rappel la médiation qatarie avait permis l’an dernier – 18 mars 2016- la libération de quatre prisonniers de guerre détenus par l’Erythrée.
« La république de Djibouti se félicite de la libération de ses quatre prisonniers de guerre détenus par l’Erythrée depuis 2008. Cette libération est le résultat de plusieurs années de tractations indirectes dans lesquelles le Qatar a servi de médiateur.
La république de Djibouti tient à remercier chaleureusement Son Altesse Sheik Bin Hamad Al-Thani pour son rôle déterminant dans la libération de ces quatre prisonniers de guerre » [1], se félicitait le communiqué de presse du ministère djiboutien des affaires étrangères.
Ce retrait qatari intervient à la suite de la décision du gouvernement Djiboutien de réduire le niveau de sa représentation diplomatique à Doha en solidarité avec la coalition internationale de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. L’Erythree n’en a pas fait moins, elle s’est également rangée derrière l’Arabie saoudite oubliant au passage que son économie sous perfusion avait été soutenue à bout de bras jusqu’à ce jour par son principal soutien dans la région, le Qatar. Cette coalition est menée par un royaume qui a fait preuve ces derniers temps d’une diplomatie régionale hégémonique et infantile.
On peut imaginer que, poussé dans une grave crise dont les causes et les motivations des acteurs ne sont pas aussi innocentes qu’il y paraît, Doha aurait espéré être payé en retour de ses efforts de pacification. Sans parler de ses nombreuses contributions directes au budget de l’État djiboutien. Le Qatar espérait sans doute la manifestation d’une solidarité minimale dans la tempête qui traverse le pays, alors que cette crise l’oppose à des pays pourtant frères.
Le Qatar n’est sans doute pas loin de penser que Djibouti a le cœur plus près du portefeuille… que du thorax !
« God knows where we’re heading », Marvin Gaye
Mahdi A.
[1] Site du ministère djiboutien des Affaires étrangères.