Couvrir avec équité, objectivité et rigueur professionnelle les processus électoraux et promouvoir la démocratie font partie des missions du journaliste. Aussi, le Syndicat du personnel de la presse et de l’audiovisuel (SPAD) est déterminé à accompagner ses jeunes journalistes en leur offrant les outils et les connaissances nécessaires pour s’acquitter convenablement de leurs tâches. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’atelier de formation organisée par le SPAD à l’hotel Rayan, portant sur la décentralisation et les élections locales.
« Le mode de scrutin, les attributions et le fonctionnement des collectivités territoriales » était l’intitulé de la formation animée par Abdoulkader Hassan Mouhoumed, docteur en droit public et avocat au barreau de Djibouti, spécialisé dans le processus de décentralisation à Djibouti.
Le président du SPAD, Kenedid Ibrahim Houssein, a ouvert les travaux de l’atelier de formation en mettant l’accent sur l’intérêt de sensibiliser et battre le rappel pour une couverture médiatique juste, équitable et rigoureuse du processus électoral. A ce titre, a-t-il ajouté, « le SPAD s’est fixé comme objectif de former et d’apporter les compétences nécessaires à leurs métiers aux jeunes journalistes qui lui sont affiliés.
Car la formation de base des journalistes est lacunaire, ce qui constitue de fait un sérieux handicap. C’est pourquoi, le SPAD travaille à combler ce déficit majeur en complétant la formation continue de ses journalistes ». Kenedid a également annoncé que de telles formations seront réitérées à l’avenir.
Au cours d’une présentation technique, le docteur Abdoulkader Hassan a longuement rappelé et mis en lumière le processus de décentralisation à Djibouti qui a été inscrit dans l’agenda politique des gouvernements successifs depuis l’indépendance. « Mais le processus de décentralisation a réellement pris son envol au début des années 2000 avec l’arrivée aux affaires du président Guelleh ». Depuis lors, le processus a connu des avancées avec les premières élections locales de 2006, puis les secondes élections en 2012 et cette troisième échéance dans un peu plus de deux semaines.
Le docteur Abdoulkader Hassan a ensuite décortiqué le processus, avec ses acquis mais aussi ses forces et ses faiblesses, ainsi que les pesanteurs qui l’ont entravé. A titre d’exemple, il a cité le manque de fiscalité locale, qui empêche les conseils communaux et régionaux de disposer d’une autonomie financière qui leur permette de mettre en œuvre leurs programmes et d’agir avec les coudées franches. Il a noté également les incohérences des textes qui nécessiteraient des réajustements et des corrections à l’avenir. Les élections communales et régionales sont très démocratiques, selon le spécialistes de la question qui a écrit un livre sur la décentralisation à Djibouti.
Cependant, il a souligné « la réticence de l’État central à respecter l’agenda de mise en œuvre du processus de décentralisation, qui se perçoit à travers les lenteurs et les délais importants entre le vote des lois et leur application concrète par des décrets, lorsque les autorités agissent notamment par le biais de textes normatifs » C’est ainsi que certains décrets d’application de la loi de 2002 n’ont été publiés que cinq ans plus tard.
L’avocat a tout de même reconnu que certaines compétences ont été transférées aux élus locaux comme le service d’état civil, la gestion des marchés, le tribunal coutumier. Il s’est tout de même offusqué que les responsables locaux manquent d’accompagnement technique, d’indépendance financière et de budget suffisant pour s’acquitter au mieux de leur mission.
Le docteur Abdoulkader Hassan a ensuite longuement expliqué les systèmes de quorum et la proportionnelle utilisée dans les répartitions des sièges à l’issue des suffrages exprimés dans les urnes. Après ce remarquable exposé, les jeunes journalistes ont assouvis leur curiosité avec des questions touchant à tous les aspects de la décentralisation et les élections locales à Djibouti. Il a été mis en exergue que la décentralisation a renforcé la démocratie participative. Cependant, force est de constater un déficit de compétences de la part des élus locaux, dont certains manquent des capacités et des savoir-faire techniques pour assurer certaines missions qui relèvent de leurs champs de compétences.
À un peu plus de deux semaines des élections locales du 24 février 2017, le moment était opportun pour préparer les jeunes journalistes aux défis des élections locales qui vont faire battre le cœur du pays durant ces deux semaines où la campagne va faire beaucoup de bruit. Ces élections sont le socle de la démocratie participative en donnant à la société civile la possibilité de prendre en main son destin en participant pleinement à l’élaboration de la gouvernance de sa destinée politique et socioéconomique.
Mohamed Ahmed Saleh