Human Village - information autrement
 
Conférence internationale sur l’apatridie et la protection
par Mahdi A., janvier 2012 (Human Village 19).
 

Malheureusement il ne suffit pas seulement de porter la robe pour réparer des tragédies, pour panser des injustices ; toute plaidoirie repose sur des textes de loi, d’ailleurs, fort heureusement j’ajouterais, puisque ce sont-eux qui nous permettent de vivre ensemble harmonieusement, tous égaux devant la loi. Cela ne veut pas dire que les textes doivent rester figés, ils doivent s’adapter à l’évolution des mentalités et des moeurs de notre communauté et le cas échéant être amendées si la nécessité se fait jour, et à fortiori, lorsqu’une iniquité, est commise sous nos yeux.
Nous ne pouvons rester les bras ballants plus longtemps devant la détresse vécue par tant d’innocentes personnes, nous devons nous mobiliser pour les sortir de l’abîme que sont leurs vies. Nous devons leur rendre l’espoir, et les accompagner de toutes nos forces dans ce combat pour le droit à l’existence. Un effort important doit être fait pour sensibiliser les autorités politiques, les citoyens pour que les personnes apatrides soient enfin reconnues, pour faire entendre leurs histoires, mais plus encore il est urgent d’informer l’opinion sur les causes et les conséquences de cette situation…
Il faut agir, mais pour cela, il faut s’attaquer aux racines de ces maux si l’on veut mettre fin à cette odyssée…
Les causes de ces souffrances sont évidemment nombreuses, telles que la perte du certificat de naissance, mais généralement, c’est surtout le défaut d’enregistrement à la naissance qui sera cause d’apatridie pour ces personnes dans notre pays. Nous ne pouvons faire payer à un enfant l’irresponsabilité de ses parents, qui n’ont pas mesuré l’importance que constitue la déclaration pour le devenir de leurs progénitures.
Ne dit-on pas que « la grandeur des citoyens c’est de rendre possible l’impossible ! »

Mahdi A.

Discours d’ouverture de Mme Marie-Antoinette Okimba-Bousquet, représentante du HCR
Permettez-moi, à l’entrée de cette manifestation, d’adresser mes remerciements et félicitations au vice président de l’Assemblée nationale, Monsieur Ali Dini Abdoulkader, ainsi qu’aux Honorables députés ici présents pour le travail qu’ils accomplissent en vue de renforcer le régime de protection des personnes à risque ainsi que des populations déplacées sur le territoire djiboutien. Je voudrais particulièrement exprimer les sincères reconnaissances du HCR pour l’importante activité parlementaire ayant abouti à la ratification de la Convention de Kampala sur les personnes déplacées internes et pour les travaux en cours, dans le cadre de l’appropriation des questions liées à la réduction de l’apatridie. Je voudrais également adresser les félicitations du HCR aux chercheurs et enseignants de l’Université de Djibouti qui se sont investis depuis plusieurs mois dans les recherches sur la protection internationale, les migrations mixtes, et surtout l’épineuse question de l’apatridie en République de Djibouti. Les résultats de leurs travaux nous permettront, j’en suis persuadée, de mieux appréhender la nature des problèmes et d’y apporter des débuts de solutions. A cet effet, le HCR voudrais ici vous réaffirmer son soutien pour la poursuite de ces travaux et la publication des résultats.

Mesdames, Messieurs,
L’organisation de la présente conférence sur l’apatride et la protection internationale entre dans le cadre des commémorations du 60e anniversaire au HCR. Ces commémorations visent notamment à marquer les dates ci-après :
 conférence internationale sur l’apatride et la protection (Djibouti, 12 décembre 2011) ;
 14 décembre 2010 : 60e anniversaire de la création de l’Office du haut commissaire du HCR le 14 décembre 1950 ;
 28 juillet 2011 : 60e anniversaire de la convention de 1951 sur le statut des réfugiés ;
 30 août 2011 : 50e anniversaire de la convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie ;
 10 octobre 2011 : 150e anniversaire de naissance de Fridtjof Nansen, 1er haut-commissaire de la Société des Nations (SDN).
En faisant de 2011, l’année des commémorations, le HCR visait trois objectifs essentiels :
Premièrement, il s’agit de renforcer le régime de protection existant et de promouvoir une dynamique nouvelle en matière de protection. Il est question ici d’explorer des voies et moyens novateurs pour combler les lacunes de protection, y compris la façon dont un régime de protection régionale ou les stratégies de coopération pourraient être utilisés plus efficacement, en parallèle avec les systèmes d’asile nationaux.
Deuxièmement, de susciter une plus grande adhésion aux conventions sur l’apatridie, ainsi qu’une meilleure cartographie du problème de l’apatridie et des moyens les plus efficaces pour y répondre.
Troisièmement, les commémorations du 60e anniversaires visent à sensibiliser le public et à renforcer la solidarité avec les personnes déplacées et les apatrides, à travers une stratégie de communication visant à influencer l’opinion publique et à élargir l’espace de protection.
Dans le cadre de ces commémorations, le HCR a organisé les 7 et 8 décembre dernier à Genève une grande conférence ministérielle à laquelle vous avez pris part, Monsieur Ali Dini Aboulkader, vice-président de l’Assemblée nationale, Monsieur Ibrahim Soubaneh, conseiller technique au ministère de l’Intérieur et Monsieur l’ambassadeur de Djibouti à Genève, pour le compte de la délégation djiboutienne. Cette conférence avait pour objectif de relancer l’engagement des États membres du comité exécutif et de prendre de nouvelles résolutions en faveur des personnes déracinées à travers le monde. Nous resterons dans l’espoir que les recommandations issues de cette conférence seraient mises en œuvre dans la droite ligne des objectifs visés par les différentes commémorations. Le 28 juillet dernier a été l’occasion de rappeler l’importance de la Convention adopté en 1951 sur le statut des réfugiés. Cette Convention est le document qui matérialise l’existence du HCR. Elle établit clairement ce qu’est un réfugié et quel type de protection juridique, d’assistance et de droits sociaux les États parties sont tenus de lui fournir. La convention de 1951 a été complété par le protocole additionnel de 1967 ainsi que la convention de l’OUA de 1969 pour ce qui concerne le cas spécifique de l’Afrique.
Toutefois la nature des mouvements migratoires a profondément changé ces dernières années et le nombre de personnes se déplaçant n’a cessé d’augmenter. Aujourd’hui, le caractère de plus en plus insoluble des conflits engendre des réfugiés apparemment permanents et mondiaux. La croissance démographique, l’urbanisation, les changements climatiques, la rareté des ressources en eau et en vivres ainsi que l’insécurité énergétique se conjuguent pour créer davantage de populations déracinées. Le HCR évalue à environ 43,7 millions, le nombre de personnes de personnes déracinées dans le monde. Ce chiffre comprend 15,4 millions de réfugiés, 27,5 millions de personnes déplacées internes et près d’un million de demandeurs d’asile. Ici en République de Djibouti, la question des réfugiés est intimement liée à la situation en Somalie.
Le phénomène se durcit avec la reprise des affrontements entre les troupes du Gouvernement fédéral de transition soutenues par l’AMISOM et les combattants d’Al Shabab sans oublier la Sécheresse qui frappe la Corne de l’Afrique qui s’est montré la plus sévère depuis 60 ans. C’est ici le lieu de féliciter la République de Djibouti, pour les efforts consentis en vue de rétablir la paix en Somalie, dans la droite ligne des accords de paix de Djibouti.
Depuis le début de l’année, le HCR et l’Office national d’assistance aux réfugiés et sinistrés (ONARS) ont enregistré 6 713 nouveaux réfugiés pour la plupart en provenance de la Somalie, ce qui porte à 21 815 le nombre de réfugiés et demandeurs d’asile installés à Djibouti, à ce jour.

Mesdames et Messieurs, honorables invités
En plus de la célébration du 60e anniversaire de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, le HCR commémore également cette année, le 50e anniversaire de la convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Cette convention a été précédée par celle de 1954, relative au statut des apatrides. La présente conférence vise à mettre en exergue la question de l’apatridie, ce qui justifie d’ailleurs l’option pour des recherches et des études approfondies. L’apatridie fait référence à la situation d’une personne qu’aucun État ne reconnaît comme son citoyen. L’absence de nationalité impliquant l’absence de droits peut avoir des conséquences dramatiques sur la vie des personnes, alors que l’article premier de la déclaration universelle des Droits de l’Homme stipule que « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». Aujourd’hui, le HCR estime a environ 12 millions le nombre d’apatrides dans le monde.
L’apatridie survient pour diverses raisons à savoir :
Premièrement : la création de nouveaux États ou la sécession d’une ou de plusieurs parties d’un territoire, avec les risques avérés d’exclusion de certaines personnes en matière de droit à la nationalité. La communauté internationale s’est félicitée de la naissance du Soudan du Sud en juillet dernier, mais il reste à observer comment les nouvelles législations en matière de nationalité seront appliquées au Soudan et au Sud Soudan.
Deuxièmement : les femmes et enfants en situation de risque.
Dans la plupart des cas, si les parents sont apatrides, les enfants le sont également dès leur naissance. Par conséquent, une nouvelle génération se retrouve aux prises avec la pauvreté et l’exclusion qui vont de pair avec l’apatridie. Sans nationalité, il est extrêmement difficile pour les enfants de fréquenter l’école ou de bénéficier d’autres services essentiels.
Troisièmement : la discrimination ethnique qui est l’une des caractéristiques sous-jacentes dans la plupart des cas d’apatridie.
La discrimination ethnique aboutit à l’exclusion, quand la volonté politique fait défaut pour résoudre le problème. Plusieurs groupes se sont ainsi vus exclus de la citoyenneté depuis que des États ont accédé à l’indépendance. Le HCR s’est vu confier le mandat de coopérer avec les gouvernements pour prévenir la survenance de l’apatridie et pour protéger les droits des apatrides. La première étape consiste pour les États à ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides, définissant qui est un apatride et établissant des normes minimales de traitement, La Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, qui fixe des principes et un cadre juridique pour prévenir l’apatridie.
Le HCR commémore également cette année, le 150e anniversaire de naissance de Fridtjof Nansen, premier haut commissaire pour les réfugiés de la Société des Nations (SDN), l’ancêtre des Nations unies, basée à Genève. En 1954, le HCR a créé en son honneur la distinction Nansen pour les réfugiés. Elle est décernée chaque année à une personne ou à une organisation en récompense de services exceptionnels rendus à la cause des réfugiés. De nombreuses et éminentes personnalités ont été lauréats de la Distinction Nansen. Cette année, le prix Nansen a été attribué à la société de solidarité humanitaire basée au Yémen. Le Prix reconnaît à cette société les services dévoués et les opérations de secours aux milliers de réfugiés et migrants qui arrivent, chaque année sur les côtes yéménites après la traversée de la mer Rouge. Cela nous amène à aborder également le problème des migrations mixtes pour lequel Djibouti est devenu un important centre de transit. Le passage des migrants mixtes de la Corne de l’Afrique vers le Yémen et au delà prend de plus en plus de l’ampleur. Au cours de cette année 2011, de janvier à novembre plus de 93 760 personnes, en majorité des Éthiopiens et des Somaliens, ont atteint les côtes yéménites à partir de la Somalie ou de région d’Obock à Djibouti. Ce chiffre est le plus élevé depuis que le HCR a commencé par compiler les statistiques en 2006.
Les migrations mixtes posent également d’importants problèmes de protection, en ce qui concerne notamment la traite et le trafic des humains. Pour mieux appréhender le phénomène et apporter des solutions idoines, le HCR travaille en étroite collaboration avec le Gouvernement Djiboutien et l’Organisation Internationale des Migration (IOM) et divers autres partenaires techniques et experts internationaux à travers le monde. Le souhait le plus ardent du HCR, en organisant la présente conférence est qu’ensemble nous puissions accorder un peu plus d’attention à la question des déplacements forcés et de l’apatridie, dans le souci de renforcer le régime de Protection à l’endroit des réfugiés et des apatrides. C’est sur ces mots que je voudrais souhaiter pleins succès aux travaux de cette conférence sur l’apatride et la protection internationale.
Vive la République de Djibouti

Allocution de Ali Dini Abdoulkader, vice-président de l’Assemblée nationale
Il m’a été fait l’insigne honneur aujourd’hui de venir m’exprimer devant ce parterre de personnalités ici présentes afin de parler d’une cause qui comme tous les Djiboutiens me tient à cœur : l’apatridie. Le terme apatride désigne une personne dépourvue de patrie, donc de nationalité légale, c’est-à-dire de la citoyenneté.
Selon la convention de New York du 28 septembre 1954, le terme « apatride s’applique à toute personne qu’aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation ». L’apatridie est une réalité poignante pour de nombreuses personnes, et dont le sort a été par le passé trop souvent ignorés. A l’aube du 3e millénaire il n’est pas acceptable qu’un être humain, puisse voir dénié le droit d’exister…
L’apatridie est une anomalie qu’il convient de combattre.
Combattre l’apatridie c’est défendre les droits de l’homme, c’est lutter contre la détresse humaine. En effet les apatrides sont dans une situation dramatique car ils ne peuvent bénéficier des droits fondamentaux d’aucun pays. Nous devons tout faire pour que plus personne ne soit mise si injustement au ban de la société. Ces cas, malheureusement trop nombreux, où on dénie à des enfants l’accès à l’éducation, aux soins de santé, ne doivent plus se perpétuer sous nos cieux.
Ce manque de reconnaissance à l’égard de ces enfants aura des effets pervers sur leur devenir. Ils seront voués à vivre en marge de la société, sans réelle chance de se développer, de s’intégrer, de s’épanouir comme les autres enfants. Pareillement leurs parents sont empêchés de travailler légalement, ce qui les rend d’autant plus vulnérables à l’exploitation de leur labeur, aux arrestations et à la détention arbitraire, à la discrimination et autres abus. Elle dénie à ces familles l’accès aux soins médicaux, et les empêche de se marier, de posséder des biens, d’ouvrir un compte en banque ou même de voyager. Ils ne peuvent enregistrer la naissance d’un enfant qui devient à son tour apatride. Ainsi entravés, c’est la citoyenneté, l’identité ou même le droit d’exister qui leur ait refusé. Il est de notre devoir collectif de tout faire pour résorber cette situation intenable et inhumaine. Les personnes dans cette situation vivent dans situations inextricables, comme l’explique si judicieusement, Antonio Guterres, haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés : « Ces personnes ont désespérément besoin d’aide car vivre dans un vide juridique relève du cauchemar, le problème se perpétue de lui même : on est apatride de père en fils ».
En conclusion je suis convaincu que notre pays fort de sa noble tradition de terre d’accueil de rencontre et d’échange, qui a accueilli beaucoup de réfugiés déclarés ou non, ratifiera la convention sur la réduction des cas d’apatridie du 30 août 1961, après s’être assuré de sa conformité avec la législation nationale.

 
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