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Djibouti rejette les accusations d’ingérence en Somalie
par Mahdi A., septembre 2021 (Human Village 43).
 

Coup de tonnerre en début d’après-midi hier, vendredi 17 septembre, lorsque le porte-parole de la République fédérale de Somalie a relayé un communiqué officiel évoquant une ingérence des autorités djiboutiennes dans les affaires internes de la nation somalienne [1]. Plus tôt, dans un autre message, il n’avait pas hésité à accuser les autorités djiboutiennes de détenir arbitrairement des officiels somaliens passagers d’un vol Turkish Airlines qui avait décollé d’Istanbul et effectué une courte escale à l’aéroport international de Djibouti où ils auraient été empêchés d’embarquer pour Mogadiscio. Parmi ces passagers figure le conseiller à la sécurité nationale du président de la République fédérale de Somalie, Farhad Yassin Haji Dahir, accompagné d’une délégation d’une quarantaine de personnes. Fahad Yassin Haji Dahir occupait il y a encore quelques jours – le 7 septembre dernier - la direction de la puissante agence somalienne de renseignement, National Intelligence Service Agency (NISA) [2]. Cet ancien directeur de cabinet du président Farmaajo, jusqu’à fin 2020 était attendu à Mogadiscio pour prendre part à une réunion sur la sécurité qui devait se tenir le lendemain samedi 18 septembre, où il devait être auditionné entre autres au sujet des accusations qui pèsent sur lui dans l’enlèvement fin juin et l’assassinat présumé d’une spécialiste en cybersécurité de la NISA, Ikran Tahlil Farah. Son limogeage du poste de directeur de la NISA par le Premier ministre somalien Mohamed Hussein Roble, a declenché un conflit ouvert et d’importantes dissensions entre le président Farmaajo et son chef de gouvernement. Ce dernier a refusé, malgré les pressions, de revenir sur sa décision.
Depuis lors les passes d’armes entre les deux plus hauts responsables du pays ne font que s’envenimer. Elles portent sur les prérogatives et responsabilités respectives des deux autorités de l’exécutif, au point d’ailleurs de mettre en périls le bon fonctionnement de l’État. C’est dans ce contexte, exacerbé par la proximité des scrutins législatifs et présidentiel cruciaux pour le devenir de la Somalie, que le président Farmajoo accuse Djibouti de prendre position dans cette crise. L’obstruction à la comparution devant la commission de Farhad Yassin Haji Dahir viserait à contrecarrer les intentions de Farmajoo de rétablir son plus proche allié dans ses fonctions à la tête de la NISA. Ses révélations devant le disculper des soupçons qui pèsent sur lui. Si cette reprise en main de la NISA était confirmée, avec le rétablissement dans ses fonctions de l’un de ses plus fidèles éléments, elle confèrerait au président Farmajoo un avantage considérable pour espérer vaincre lors des prochaines échéances électorales.
Le ministre djiboutien des Affaires étrangères, Mahmoud Ali Youssouf [3], ainsi que celui des Finances, Ilyas Moussa Dawaleh [4], ont tour à tour rejeté formellement ces accusations d’ingérence dans les affaires de la Somalie sur leur compte twitter, et appeler à la modération. Pour Mahmoud Ali Youssouf, cette tempête dans un verre d’eau aurait été causée par un incident technique de l’avion de Turkish Airlines ayant entrainé le retour de ce dernier vers l’aéroport d’Istanbul.
Au moment où nous publions ces quelques lignes, selon une information non confirmée Fahad Yassin Haji Dahir et les membres de sa délégation devraient à atterrir à l’aéroport de Mogadiscio, ce samedi 18 à bord d’un vol spécial de Turkish Airlines qui a couvert le trajet Istanbul–Mogadiscio sans escale.

L’intensité de la crise entre le président et le Premier ministre risque de faire dérailler le fragile processus électoral et annihiler les efforts de la communauté internationale de refondation de l’État en Somalie dans ses frontières reconnues internationalement. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le conseil de sécurité réuni hier à huis clos a exhorté les parties à régler le différend politique dans les meilleurs délais, craignant sinon des répercutions systémiques sur le bon fonctionnement des organes de l’État.

« Alors que les Somaliens célèbrent le premier anniversaire de l’accord du 17 septembre, l’ONU et ses partenaires internationaux ont déclaré aujourd’hui qu’ils sont de plus en plus alarmés par la menace que fait peser l’escalade entre le Président et le Premier Ministre sur la stabilité de la Somalie et le processus électoral. L’ONU exhorte les deux personnalités à résoudre immédiatement leur différend, à éviter les échanges inutiles de déclarations publiques et d’annonces sur le personnel, à s’abstenir de toute action susceptible de déstabiliser la situation sécuritaire et à se concentrer de nouveau sur les élections tant attendues » [5].

Mahdi A.


[1Voir en ligne le premier et le deuxième tweet du porte parole de la Somalie.

[3Voir en ligne le premier, le second et le troisième tweet ://twitter.com/ymahmoudali/status/1438850991886065664] de Mahmoud Ali Youssouf.

[4Voir en ligne le tweet d’Ilyas Moussa Dawaleh.

 
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