Un courrier reçu par la rédaction à la suite de nos articles sur les assurances.
Par hasard, et quelque peu en retard vous en conviendrez, je viens de prendre connaissance de vos articles sur la duplicité des assureurs djiboutiens et votre demande aux lecteurs de communiquer leurs témoignages.
Les accidentés de la route sont aussi régulièrement des expatriés occidentaux, mais le fonctionnement des assurances, que leurs autorités nationales les oblige à souscrire, n’en est pas meilleur pour autant…
J’ai vécu plusieurs années à Djibouti. Arrivé en juillet 2017, mon séjour de trois ans s’est terminé en juillet 2020.
J’ai été victime d’un banal accident de la circulation le 14 décembre 2019, lors d’une sortie en famille.
Un changement de direction vers la gauche pour s’engager vers la route d’accès à un parking, puis pendant la manœuvre un véhicule surgissant derrière à toute allure et tentant un dépassement impossible, sans chercher à ralentir.
Sur la photo, mon véhicule noir gît sur le flanc, couché par la violence du choc survenu au-dessus de la roue arrière gauche.
L’autre véhicule, le blanc, est un véhicule de l’ONEAD, conduit par l’un de ses agents.
A bord de mon véhicule, quatre personnes dont deux se sont vues prescrire des ITT : deux jours pour moi (fortes douleurs à l’épaule gauche), trois jours pour ma fille cadette, alors en vacances (arcade sourcilière ouverte et traumatisme crânien).
L’accident est survenu à Dimbya, au lieu touristique dit « Grand canyon ».
Intervention et affaire suivie par la brigade de Oueah.
Plus de deux ans après, tout est au point mort...
Mon assurance AMERGA, à qui j’ai déclaré le sinistre dès le lendemain, a estimé la valeur du véhicule à moins de 500.000 FDJ, économiquement irréparable, mais s’est dite en attente du PV de la gendarmerie de Oueah, en charge du dossier ; elle m’a enjoint, de plus, de récupérer le PV moi-même au bureau d’ordre du Palais de justice.
Contrairement à la loi n° 40/AN/99 du 08/06/1999, article 148, instaurant un délai de trois mois à cet effet, le PV n’a été produit par ladite brigade de gendarmerie qu’au début de l’été 2020 alors que j’avais déjà un pied dans l’avion du retour.
Aucun contact de la part de l’assureur adverse, GXA… D’ailleurs j’ai ouï dire que la partie adverse n’aurait jamais déclaré le sinistre.
Par un pur hasard, ayant été en contact avec une avocate, qui s’est désistée (elle a pour client l’ONEAD, propriétaire du véhicule adverse), elle m’a assuré avoir pris contact avec le service juridique de ladite administration, mais pas d’évolution depuis.
De plus, le PV de la gendarmerie djiboutienne est plutôt rédigé à ma charge, ma déclaration recueillie le jour de l’accident l’ayant été sur un cahier de brouillon au crayon à papier… En effet, tout le monde sait qu’un conducteur djiboutien ayant provoqué un accident ne peut être considéré en faute et que l’étranger aura toujours tort.
Mon seul souhait initial était d’obtenir rapidement un dédommagement pour mon véhicule détruit, d’une somme pour le moins symbolique compte tenu de la solide assise financière de la partie adverse, afin de classer cette affaire au plus vite dans les mauvais souvenirs. C’est pourquoi j’ai fini par saisir un avocat djiboutien, qui a encaissé une avance de frais, mais dont je n’ai aucune nouvelle depuis bientôt deux ans (pas un mail, pas un coup de fil, pas la moindre copie d’un acte qu’il aurait pu rédiger) ; aujourd’hui le peu d’empressement de chacun me laisse à penser que tout ce beau monde joue la montre et a attendu patiemment mon départ pour classer l’affaire en me privant de mon droit légitime à indemnisation. Un déni de justice en bande organisée… Les assureurs, les avocats, les gendarmes, l’ONEAD, un système verrouillé au niveau d’un pays tout entier baignant dans la corruption, n’hésitant pas à jeter les droits de l’homme aux orties !
J’ai payé cette situation sans que personne ne s’en soucie outre mesure : le véhicule n’a pu être réparé, mais je n’ai pas pu revendre l’épave à mon garagiste (attente de l’expertise de l’assurance adverse GXA, qui ne s’est jamais faite) laissant le double des clés et la carte grise à mon avocat en quittant le territoire, et j’ai supporté chaque mois d’importants frais de location de voiture, car évidemment je n’allais pas racheter un véhicule pour quelques mois. Un préjudice, rien qu’en location, d’environ 1 170 000 FDJ.
L’obtention d’un préjudice moral aurait également été appréciée, juste prix du sang versé par ma fille sur le sable djiboutien, laissant une tâche sinistre sur l’encolure de sa robe blanche.
Espérant que ce « coup de gueule » sera utile...
Régis Calvarin