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« Les précédentes inondations : on n’en a tiré aucun enseignement », selon Ismail Omar Guelleh
par Mahdi A., novembre 2019 (Human Village 37).
 

Les pluies torrentielles qui se sont abattues sur Djibouti ont fait sept morts, selon un premier bilan provisoire du directeur de la protection civile. Les dégâts matériels risquent de se chiffrer à plus d’une dizaine de milliards de nos francs, si l’on prend pour échelle le chiffrage de l’évaluation du cyclone Sagar par la Banque mondiale, qui a été sans aucun doute d’une moindre ampleur. Le Rapport d’évaluation rapide des dommages et besoins post-cyclone Sagar [1], avait évalué à 29 millions de dollars (plus de cinq milliards de francs-djibouti) l’impact sur notre pays.

Mea Culpa
Les scènes de désolation ne manquaient pas au lendemain de cette quatrième journée d’inondations qui ont ravagé la capitale et l’arrière-pays : routes et commerces détruits, terrains affaissés, habitations immergées, voitures endommagées par centaines.
Les habitants de la capitale sont en colère et considèrent que les autorités djiboutiennes ne sont pas exemptes de responsabilité dans ce drame. Ce matin, dimanche 24, le président de la République ne rejetait pas les critiques de la population à l’égard du gouvernement. Ismail Omar Guelleh esquisse même un mea culpa sur sa gestion de la crise en s’exprimant lors d’une réunion de crise au palais présidentiel, qui réunissait tous les départements mobilisés pour secourir les sinistrés. Il a posé un constat sans appel, pas éloigné du sentiment de la population, sur la pagaille de la gestion par les services de l’État des personnes impactées par les pluies.

« Les précédentes inondations : on n’en a tiré aucun enseignement. Les équipements doivent être constamment révisés, entretenus. Les scénarios d’anticipation que nous aurions dû établir pour être déployables à tout moment, en cas d’incendie, en cas de sinistres, en cas de tremblement de terre, n’ont pas fonctionné. Bien au contraire, les gens se sont éparpillés, chacun a couru de son côté ».

Il confesse l’insuccès du gouvernement à apporter une réponse adaptée et diligente aux difficultés de ses administrés. Il faut reconnaitre au chef de l’État l’honnêteté d’assumer ses responsabilités devant les défaillances multiples de ses services, comme l’inorganisation des services d’urgence, l’absence de préparation du personnel, sans parler de l’absence d’entretien du matériel de secours et de coordination des départements… Qu’attend-il de ces fonctionnaires rabroués devant les caméras ? « Nous voulons un tableau du sinistre d’abord ». Dans un second temps, il attend qu’ils se ressaisissent. Il semble dire qu’il ne tolèrera plus aucun relâchement ni aucune négligence, et ce d’autant plus, qu’in fine, il lui incombe de porter sur ses épaules le fardeau des manquements commis par ses collaborateurs. Il ne peut se défausser sur autrui. L’échec est avant tout le sien. C’est la raison pour laquelle, il veut rapidement sur sa table des propositions de mécanismes nationaux de préparation, de gestion et de réponses aux différents désastres naturels envisageables. Il les appelle « à prendre [aussi] leur responsabilité […], de mettre en place tout un dispositif qui permette que l’on fasse face à ces défis à travers des hypothèses crédibles reposant sur différents risques ».
Petite suggestion : une commission d’enquête parlementaire devrait être constituée pour évaluer les dégâts et établir les responsabilités. Par la même occasion, elle pourrait confondre les « idiots » qui ont autorisé l’obstruction du canal Einguela Sud pour y construire des commerces, alors que se situait dans ce couloir l’un des principaux collecteurs des eaux de pluies pour le rejet en mer. Que dire, si ce n’est faire la supposition que, malheureusement, c’est encore une fois la quête de gains vénaux décomplexés, et l’inaction des services d’assainissement et d’urbanisme face à ce méfait qui seraient à l’origine du plus grave dysfonctionnement de notre réseau de collecte et d’évacuation des eaux de pluies.

Qui fait quoi ? Quand ? Et surtout comment ?
Le Secrétariat exécutif de gestion des risques de catastrophes (SEGRC) est, sur le papier, en quelque sorte l’équivalent du FEMA américain. Ce département a la responsabilité de coordonner toutes les institutions qui fournissent des données et celles qui disposent de moyens logistiques. Lesquelles ?
Dised, CERD, Agence nationale de la météorologie et, pour les moyens, la protection civile, l’ONARS, ONEAD, EDD, la voirie, la police, la gendarmerie, l’armée, les gardes-côtes, les ministères sectoriels appropriés… Mais dans la réalité, cet outil est-il fonctionnel et surtout dispose t-il des moyens humains, matériels, et financiers nécessaires ? Au vu du remontage de bretelles des responsables de département par le chef de l’État, qui dénonce le manque de coordination des services concernés, il faut convenir que non ! Mais la législation reconnaît-elle au Secrétariat exécutif de gestion des risques de catastrophes un leadership en période de calamité ? A l’image de sa grande sœur américaine, le SEGRC ne devrait-il pas, pour des raisons évidentes d’efficacité, être placé sous l’autorité directe du chef de l’État plutôt que du ministère de l’intérieur ? Dans le même ordre d’idées, où en sommes-nous avec les plans ORSEC et POLMAR ? Sont-ils adaptés ou dépassés ? Est-il nécessaire de les remettre à jour ? Qui est en charge des autorisations de délivrance des permis de construire et de vérifier que l’assainissement des eaux domestiques usées et la collecte des eaux pluviales sont assurés ? Qui contrôle le bon état de fonctionnement du réseau de collecte des eaux pluviales ? Les recommandations contenues dans le Rapport d’évaluation rapide des dommages et besoins post-cyclone Sagar ont-elles été observées ?

En outre disposons-nous d’une législation appropriée sur l’état de catastrophe naturelle ? Djibouti dispose-t-elle d’un fonds d’indemnisation des victimes de calamité naturelle ou son équivalent ? L’État dispose du Fonds de solidarité national (FSN), du secrétariat d’État aux affaires sociales. Mais comment est-il financé ? Comment y accède-t-on ? Quels sont les critères d’éligibilité ?

Mahdi A.

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