Human Village - information autrement
 
Rencontre avec Joaquin Gonzalez-Ducay
par Mahdi A., décembre 2008 (Human Village 3-4).
 

Monsieur le délégué, dans un premier temps, pouvez-vous nous exposer les grandes orientations de la mission de la Commission européenne à Djibouti ?
La délégation de la Commission européenne auprès de la République de Djibouti est une des 137 représentations diplomatiques de la Commission européenne localisées de par le monde. Elle a été ouverte en 1979, deux ans après l’accession de Djibouti à l’indépendance.
La délégation à Djibouti assure la représentation de la Commission européenne auprès du gouvernement de Djibouti et le suivi des relations bilatérales dans les domaines politique, économique et commercial. Elle assure également la gestion de la coopération financière et technique, inspirée entre autres, par les principes et les objectifs de l’accord de Cotonou.
Dans ses domaines de compétence, la délégation travaille très étroitement avec les ambassades des États membres de l’Union européenne et avec les organisations internationales et régionales.

Dans le domaine de la coopération au développement, pourriez-vous nous indiquer l’action de l’UE ces dernières années en faveur de la République de Djibouti ?
Les débuts de la coopération entre l’Union européenne et Djibouti remontent aux toutes premières étapes de la construction européenne. Le premier Fonds européen de développement (FED), créé en 1958, et ceux qui se sont succédés depuis, ont permis à l’Europe de consacrer des sommes de plus en plus importantes au développement de Djibouti, avant même que le pays n’accède à l’indépendance en 1977.
Du 2e FED (1963) au 10e FED (2008), les contributions du FED en faveur de Djibouti sont ainsi passées de 1.5 à 40.5 millions d’euros, auxquelles il faut ajouter les aides à l’ajustement structurel, les aides d’urgence, et les fonds apportés par les programmes régionaux et thématiques, entre autres. Sur les vingt-cinq dernières années donc, les ressources financières attribuées à Djibouti ont été de l’ordre de 165 millions d’euros. Ces ressources, mises à disposition intégralement sous forme de dons, ont permis :
 l’amélioration des conditions de vie des populations urbaines et rurales, à travers les importants programmes d’assainissement de la ville de Djibouti et la création/restauration de points d’eau dans de nombreuses contrées rurales ;
 de soutenir les dépenses de l’État dans les secteurs sociaux, surtout ceux de la santé et de l’éducation ;
 de valoriser Djibouti tant que plateforme régionale pour le commerce et les services, à travers l’amélioration de son réseau routier et ferroviaire. Permettez-moi de vous donner un exemple très concret. En raison de sa position géographique privilégiée, le port de Djibouti représente la principale voie d’accès pour les marchandises à destination de l’Éthiopie. Le maintien indispensable des flux de transport entre les deux pays a donc conduit le gouvernement de Djibouti et la Commission européenne à choisir les infrastructures de transport comme un des domaines prioritaires de leurs efforts.
Ces efforts se sont traduits d’un côté par la construction et/ou la réhabilitation des rocades périurbaines et urbaines de la ville de Djibouti et de l’autre par la réhabilitation de la route nationale 1 :
 la réhabilitation des rocades urbaines et périurbaines de la ville de Djibouti (14,6 km pour un coût de 11.6 millions d’euros), terminée en décembre 2007, a concerné les voies suivantes : la rue de Venise et son prolongement jusqu’à Balbala (8.7 km) ; la rue Nelson Mandela (1,8km) ; la rue des Salines (0.8 km) ; la rue 26 (1,0 km) et le boulevard du Général de Gaulle (2,3km).
Ce projet a eu comme valeur ajoutée d’éviter au centre ville de connaître toutes les nuisances - bruits, gaz d’échappement… - liées à une circulation intense de véhicules lourds. II a eu également un impact favorable sur les populations urbaines riveraines, dans la mesure où il a aussi comporté la construction de nouveaux réseaux d’eau, d’éclairage public et de lignes téléphoniques.
Lorsque le tronçon de la route entre la ville éthiopienne de Dire Dawa et la frontière djiboutienne à Gueulé sera réalisé, le corridor sud qui rejoindra le port de Djibouti à la localité de Gueulé constituera une alternative au corridor nord existant, qui rejoint le port de Djibouti à Galafi. Dans cette perspective, la route nationale 1, qui joint Djibouti à la frontière éthiopienne à Gueulé est en cours de réhabilitation sur un premier tronçon entre le carrefour d’Arta et le Grand Bara (40 km pour un coût de 25,5 millions d’euros). Depuis novembre 2008, environ 20 km sont ouverts à la circulation. La fin des travaux, qui auront duré deux ans, est programmée pour décembre 2009.
Le deuxième tronçon pourra être entamé dès que le financement nécessaire aura été acquis. Éventuellement dans le cadre du programme régional du FED pour l’Afrique de l’Est, en cours de discussion.

Quels sont les projets envisagés à l’avenir dans le cadre de la coopération entre l’UE et la République de Djibouti ?
La stratégie de coopération de l’Union européenne pour Djibouti, définie conjointement pour la période 2008-2013 (10e FED), visera à appuyer la politique de réduction de la pauvreté mise en place par le Gouvernement dans le cadre de l’Initiative nationale pour le développement social (INDS), lancée en janvier 2007. Pour être plus efficace, elle sera concentrée sur trois secteurs : l’eau, l’assainissement, et les énergies renouvelables. Et c’est d’ailleurs à juste titre, puisque dans 11 INDS, l’eau et l’énergie constituent deux secteurs prioritaires. Qui coïncident d’ailleurs pleinement avec les propres stratégies de l’Union européenne, qui travaille activement pour un monde où l’énergie propre issue de source renouvelable et l’eau potable soient à la portée de tous. Dans ce contexte, deux grands projets sont en voie de formulation :
 énergies renouvelables : renforcement de l’interconnexion électrique avec l’Éthiopie (électricité d’origine hydraulique) et construction d’une ligne rejoignant la future usine d’électricité du lac Assai (source géothermique) (25,5 millions d’euros)
 eau : construction à Boullé-Aéroport d’un barrage écrêteur de crues et de retenue d’eau sur l’oued Ambouli (13 millions d’euros). A côté de ces secteurs, l’Union européenne compte appuyer la République de Djibouti dans le domaine de la sécurité alimentaire, plus concrètement dans ses efforts pour faire face aux conséquences de la crise globale causée par l’augmentation des prix alimentaires. Enfin, dans le cadre de la politique de l’Union européenne de promotion de la paix et la sécurité, l’identification des voies d’une coopération dans laquelle l’Union européenne apporterait un soutien à Djibouti pour l’amélioration de la sécurité sur les routes maritimes critiques, est actuellement en cours.

Du point de vue politique, quel est l’état du dialogue politique entre l’Union européenne et la République de Djibouti ?
L’Union européenne entretient avec Djibouti un dialogue régulier sur des questions politiques, économiques et sociales d’intérêt mutuel. il se tient soit à la faveur des fréquents contacts informels qui ont lieu sur place avec la présidence pro tempore de l’Union européenne, exercée par la France, et avec la délégation de la Commission européenne, soit à travers les réunions périodiques instituées par l’article 8 de l’accord de Cotonou, soit dans le cadre des visites officielles des hautes personnalités djiboutiennes en Europe, ou vice versa.
Des sujets récents de ce dialogue on été, entre autres : les efforts de la République de Djibouti dans la recherche d’une issue pacifique au conflit frontalier qui l’oppose à l’Érythrée, l’évolution du processus de paix et de réconciliation en Somalie, l’engagement de l’Union européenne dans la lutte contre la piraterie ou l’impact de la crise globale dans la sécurité alimentaire. Ce dialogue nous permet de mieux nous connaître et de mieux coordonner nos actions, dans tous les domaines, au niveau national, mais aussi l’échelle internationale.

Pour terminer, quelles sont, selon vous, les perspectives d’évolution des relations entre l’Union européenne et la République de Djibouti ?
Comme j’ai indiqué au début de cet entretien, ce sont des relations établies depuis près de trente ans, donc solides et qui se portent très bien. A tel point que la Commission européenne a décidé d’élever le rang de sa délégation à Djibouti. Dès 2009, notre délégation verra donc ses compétences élargies et son personnel renforcé. En plus, afin de consolider l’engagement de l’UE vis-à-vis de l’IGAD et promouvoir l’image de Djibouti comme capitale des pays de l’IGAD, l’ambassadeur-chef de la délégation sera accrédité aussi auprès de cette organisation. Bref, nous comptons resserrer d’avantage les liens avec un interlocuteur stable dans la région, situé stratégiquement au croisement des diverses influences économiques, culturelles et religieuses et qui à son tour peut assurer des ouvertures et un dialogue avec toutes les forces de la région.
L’avenir ne peut être donc que prometteur.

Propos recueillis par  Mahdi A.

 
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